Article écrit à l'occasion des soixante-dix ans de la maison d'édition YMCA-Press en 1990.
Lorsque, en 1955, A.B. Kartachev publiait un article dans « Le Messager de l’ACER » (Vestnik RSKhD) sur le succès historique d’YMCA-Press, il aurait pu sembler que l'activité de la maison d'édition appartenait déjà au passé... Le nombre de livres publiés était tombé à deux ou trois par an, tandis que la maison d'édition Tchekhov, établie aux États-Unis, publiait plusieurs dizaines de titres à un rythme soutenu. Mais la maison d'édition Tchekhov n'a pas fait long feu (elle a fermé en 1956), alors qu’YMCA- Press était destinée à poursuivre une longue route, trente-cinq nouvelles années fructueuses. Et aujourd'hui, la maison d’édition, qui a fêté ses soixante-dix ans, se tient fermement debout, peut-être plus fermement que jamais... Après la mort de Nicolas Berdiaev en 1948, la maison d'édition continue d'être dirigée à distance, des Etats-Unis, par D. Laury et P. Anderson, tandis que la direction effective est confiée à un employé de longue date d’YMCA-Press, désormais âgé, Boris Kroutikov, un homme compétent mais à la culture insuffisante. Les années 1950 ont vu un changement de génération au sein du centre de l’YMCA, américain, et pour les nouvelles personnes en charge de l'organisation, le domaine russe et les problèmes de philosophie religieuse, semblaient difficiles à comprendre, étrangers et non pertinents. Inquiet du sort de sa création, Pavel Anderson prit la décision de confier la maison d'édition à l'organisation la plus vivace de l'époque en France, l’Action Chrétienne des Étudiants Russes. Le mouvement de l’ACER avait, dans l’émigration, parcouru un chemin similaire à celui d’YMCA-Press. Créé avant la révolution en Russie grâce à la ferveur missionnaire américaine, il s'est transformé en un véritable mouvement de jeunesse orthodoxe lors de la célèbre conférence de Pcherov en 1923. À la fin des années 1940 et au début des années 1950, l’ACER a connu en France un nouvel essor.
Sous la présidence immuable du toujours jeune père Vassili Zenkovski, qui avait trouvé en Ivan Vassilievitch Morozov un secrétaire énergique, l’ACER réunissait un large éventail de jeunes croyants au sein de cercles de discussion, à l’occasion de congrès et de camps d'été, s'efforçant de surmonter le fossé entre la piété confinée à l’église et le monde. Le père Vassili Zenkovski cumulait alors les fonctions les plus diverses : doyen de l'Institut de théologie, président du conseil diocésain et prêtre de paroisse, mais il considérait néanmoins son travail avec les jeunes et le développement de l’ACER comme l'œuvre la plus importante de sa vie. Sur sa recommandation, trois membres du Conseil de l’ACER ont été nommés pour gérer la maison d'édition : Ivan Morozov comme directeur, Boris Fiz comme responsable financier et Nikita Struve comme conseiller littéraire. Au sein du comité exécutif, le trio des « Acériens » a été complété par deux représentants de l'YMCA américaine. Ainsi, la majorité des voix et la véritable direction demeuraient aux mains de l’ACER.
A leurs débuts, les éditeurs débutants n'ont pas eu la tâche facile : le soutien financier de l'YMCA était réduit au minimum, les années d’absence de direction active avaient généré une gestion de routine.
De plus, la maison d'édition était installée au rez-de-chaussée d’un hôtel particulier avec une enseigne peu visible, dans un quartier élégant mais non littéraire. Mais nous avons eu de la chance: en 1961, l'hôtel particulier a été mis en vente et, grâce à une opération immobilière couronnée de succès, il nous a été possible d'acheter un beau local au centre du Quartier latin, entre la cathédrale Notre-Dame et le Panthéon. Depuis longtemps déjà, YMCA-Press avait créé une société de distribution de livres de divers éditeurs étrangers, appelée Société des Éditeurs Réunis. Après la guerre, la vente de livres soviétiques s'est ajoutée à celle des livres étrangers.
L'ouverture de la librairie de la rue de la Montagne Saint-Geneviève marqua le début d'une nouvelle ère pour la maison d'édition. Par hasard … ou non, lors du déménagement, une grande reproduction en noir et blanc du tableau Sainte Geneviève enfant en prière de Pierre Puvis de Chavannes (des fresques ornant les murs du Panthéon) a été retrouvée abandonnée dans le sous-sol des anciens locaux. Il est à noter que sainte Geneviève (Ve siècle), patronne de Paris (Gueorgy Fedotov lui a consacré une excellente étude dans l'un des premiers numéros de la revue « La Voie »(Pout’), a étendu trois fois son voile sur les Russes en France : on sait que dans une banlieue nommée en son honneur s’est développé à partir de 1926 un cimetière orthodoxe russe ; grâce aux efforts de Vladimir Lossky, la première paroisse orthodoxe francophone a été ouverte dans la rue nommée d’après sainte Geneviève; et enfin, dans cette même rue s’est installée une maison d'édition orthodoxe.
Elle se développait lentement : il restait peu d'auteurs vivants (il y avait très peu d'auteurs écrivant en russe parmi la deuxième génération de l’émigration), et les fonds pour les publications étaient très limités. Pour éditer une série de livres hérités de l’immédiate époque pré et post révolutionnaire (Contemplation en couleurs de E. Troubetskoï, le recueil Des Profondeurs et d’autres), il fallut сhercher des fonds partout et même parfois payer de sa poche.
Le renouveau est venu avec la fin du second dégel de Khrouchtchev et le développement du samizdat, qui s’est rapidement transformé en tamizdat. Les manuscrits ont commencé à affluer tout seuls, souvent à l'insu des auteurs, au mieux avec leur consentement tacite. C'est ainsi que YMCA- Press, avec d'autres éditeurs, a publié Le Pavillon des cancéreux et Le Premier Cercle. Mais le véritable événement qui a largement déterminé le sort d’YMCA-Press et son épanouissement fut une lettre d’ Alexandre Soljenitsyne dans laquelle, après le refus de la revue « Novy Mir », il confiait à YMCA-Press la publication d’Août 14.
Puis, trois ans plus tard, Soljenitsyne s'est tourné vers YMCA-Press avec une mission encore plus cruciale: publier le premier volume de L'Archipel du Goulag dans les plus brefs délais et dans le secret le plus absolu. Sauf erreur de ma part, le signal "publiez !" a été donné à la mi-octobre. Contrairement au souhait de l'auteur que le travail se fasse au milieu de nulle part, en province, il a été décidé de confier la composition à notre imprimeur habituel, Léonid Lifar (frère du célèbre maître de ballet). Ayant connu les premières horreurs de la collectivisation à Kiev, il a traité la tâche qui lui était confiée avec un respect quasi religieux. Et bien que le travail ait été effectué dans une grande et bruyante imprimerie de Paris, le secret fut gardé.
La bombe explosa le 28 décembre 1973. Ce livre-événement, phénomène qui n’arrive qu’une fois par siècle, a placé notre maison d’édition au centre de l’attention mondiale. En quelques semaines, le premier volume a atteint le tirage sans précédent dans l'histoire de l'émigration (et qui n’a, bien évidemment, jamais été dépassé depuis) de 50 000 exemplaires. Même ceux qui ne lisaient pas le russe, ou très peu, l’achetaient, comme un objet, comme une relique. Les nouveaux dirigeants de l'YMCA américaine ont été quelque peu surpris d’apprendre l’existence, grâce à L’Archipel, d’une maison d’édition portant le nom de leur organisation : ils avaient déjà eu le temps de l’oublier. Avec la parution de L’Archipel et l’exil de l'auteur qui s'en est suivi, la décennie Soljenitsyne a commencé, non seulement pour YMCA-Press, mais pour toute la culture et l'histoire mondiales.
En l’espace d’un demi-siècle, ce sont deux traditions qui se sont vues réunies dans YMCA-Press : celle de la philosophie religieuse et celle de la littérature prophétique ; toutes deux intolérables pour le régime soviétique, elles ont été marquées par des expulsions. L’expulsion des philosophes par Lénine en 1922 correspond à celle de Soljenitsyne par Brejnev en 1974... La première a permis la création de la maison d'édition, la seconde lui a donné un nouvel élan.
Les œuvres déjà prêtes pour la publication, envoyées à l’avance par Soljenitsyne, l’attendaient en Occident : la prophétique Lettre aux dirigeants, déjà imprimée, qui anticipait les grandes orientations de la perestroïka, l’appel Ne pas vivre dans le mensonge « plus lourd que bien des volumes » qui fit le tour de la planète, les tomes 2 et 3 de L'Archipel du Goulag, à couper le souffle. Dans un tourbillon d’apparitions à la télévision et d'interviews dans les journaux, YMCA-Press participait à la finalisation du recueil de textes sociopolitiques Des voix sous les décombres, le premier cinquante ans après Des profondeurs qui avait été saisi à l’imprimerie même (il rappelle ce dernier non seulement par son contenu, mais aussi par son titre), ainsi que d’une enquête anonyme (on le sait aujourd’hui : il s’agit d’une œuvre posthume inachevée d'Irina Medvedeva Tomachevskaïa) sur le véritable auteur du Don Paisible. Dans le silence des montagnes suisses, Soljenitsyne achevait ses mémoires littéraires Le chêne et le veau, composait Lénine à Zurich à partir de divers chapitres de l'épopée La roue rouge, qui, même maintenant, après la publication des "Nœuds", mérite une existence indépendante, tant la lutte intérieure entre le lauréat du prix Nobel et le leader de la révolution mondiale y est intense...
YMCA-Press n'était pas préparé à un tel rythme de travail : les nombreuses œuvres de Soljenitsyne devaient être publiées en urgence pour consolider leur fort impact social et politique, mais également pour libérer l’auteur, afin qu’il puisse se consacrer tranquillement à son travail de chroniqueur de l’épopée de la révolution.
En même temps que Soljenitsyne, ou à sa suite, YMCA-Press a commencé à publier presque tous les auteurs les plus en vue de l'URSS : parmi les plus importants, citons I. Dombrovski (La Faculté de l'inutile), Nadejda Mandelstam (Souvenirs), Lidia Tchoukovskaïa (Entretiens avec Anna Akhmatova), V. Chalamov. La maison d’édition recevait des manuscrits de classiques russes de l’époque soviétique, épargnés par les flammes, notamment Cœur de chien de Boulgakov et Tchevengour de Platonov, deux chefs-d'œuvre incontestables du milieu et de la fin des années 1920. Les nouveaux défis auxquels a été confrontée la maison d'édition ont conduit, une fois la période de "tempête et de passion" calmée, à une transformation radicale. À la fin des années 1970 et au début des années 1980, quatre des cinq membres du comité exécutif sont décédés l'un après l'autre. Le dernier à décéder était le plus âgé d'entre eux, l'un des fondateurs de la maison d'édition, P.F. Anderson. Avec sa mort, tout lien avec l’YMCA américaine a été définitivement rompu. Avant sa mort, P. F. Anderson a eu le bonheur de voir son livre de mémoires en anglais, No East or West, édité par YMCA-Press. Il est assez symptomatique qu’il n’ait pas trouvé d’éditeur pour cet ouvrage aux Etats-Unis, lui, un Américain de naissance, membre éminent d'une grande organisation sociale ! Deux membres de l’ACER (Cyrille Eltchaninoff et Daniel Struve) et deux Russes n’appartenant pas à l’ACER (Nathalie Schmemann et Natalia Soljenitsyne) ont rejoint le Comité exécutif. Ainsi, pour la première fois de son histoire, la gestion de la maison d'édition était entièrement entre les mains de Russes ou de membres de la communauté russe émigrée, et, comme auparavant, les membres de l’ACER conservaient la majorité (trois voix sur cinq) en cas de décisions importantes. Pour assurer l’avenir de la maison, quelles que soient les vicissitudes qui pourraient survenir par la suite, son personnel a été réduit de plus de moitié et, en raison des progrès techniques, YMCA-Press a également entrepris de saisir le texte de la plupart de ses livres sur ordinateur. Ces transformations ont entraîné une augmentation de l'activité éditoriale : pour la première fois de son existence, YMCA-Press a commencé à publier régulièrement 20 livres par an. Si à l'époque « berdiaevienne », la maison d'édition avait sa propre revue trimestrielle, « La Voie » (Pout’), qui réunissait la fine fleur de la philosophie religieuse de l'émigration (à l'exception de Ivan Iline et Pierre Struve, dont les différends avec Berdiaev s’étaient aggravés), dès les années 1970, c’est la revue « Le Messager de l’Action Chrétienne des Étudiants Russes » ( Vestnik RSKhD) qui occupa cette place. Ayant omis sur la couverture, à la suggestion d’Alexandre Soljénitsyne, le terme restrictif « étudiant », et ajouté au lieu d’édition (Paris), New-York, d’où venaient les meilleurs théologiens, d’ailleurs formés à Paris, et Moscou, d’où parvenaient sans discontinuer les manuscrits en samizdat, portant le volume de la revue à 300 pages, « Le Messager » (Vestnik) compensait, par son large horizon— au-delà de la théologie, on y trouve des sections littéraire et sociale — l’absence de grands philosophes qui faisaient le renom de « La Voie », et poursuivait la tradition, commencée par Soloviev, d'un christianisme actif auquel aucun domaine de la vie humaine n’était étranger. Le programme éditorial a été systématisé. Dans les profondeurs des forêts du Vermont, Natalia Soljenitsyne a saisi de ses propres mains les dix-huit volumes des Œuvres complètes de son mari, qu’YMCA-Press a publiées en trois versions : reliées, par souscription, brochées pour la vente au détail et en petit format, principalement pour être expédiées en Russie. Non content de son travail sur les « Nœuds » de son épopée monumentale, (à ce jour, 10 volumes sur 12 sont parus), Soljenitsyne a créé deux collections, qui connaissent toutes deux un grand succès. La première est consacrée aux zones d’ombre de l'histoire russe contemporaine et compte déjà huit volumes. La seconde, intitulée « Notre passé proche », est constituée de journaux intimes et de mémoires, et cherche à ressusciter la vie quotidienne, l’atmosphère d'une époque à jamais révolue, qui échappe trop souvent aux historiens : ainsi le lecteur pourra se familiariser avec la vie de la noblesse (N. Volkov, E. Troubetskoï, E. Sayn-Wittgenstein), le développement des zemstvo (V. Obolenski), la lutte contre le terrorisme (A. Guerassimov), la dégradation progressive de la justice dans les années 1920, les dures conditions de la captivité allemande, etc. La section des mémoires est également richement représentée même en dehors de la série « Notre passé proche » : on y trouve la Géorgie menchevique (le général Kvinitadze), les Russes de Harbin (E. Ratchinskaïa), le récit de l’isolement pendant vingt-cinq ans dans une cellule individuelle de B. Menchaguine, témoin du massacre de Katyn, et bien d'autres choses encore... La littérature de fiction, ces dernières années, est passée au second plan, à l'exception des « Nœuds » de Soljenitsyne et du riche héritage de l'âge d'argent, encore loin d'être épuisé.
Ainsi, YMCA-Press a publié la collection la plus complète des œuvres de M. Volochine, a réédité les romans oubliés de S. Klytchkov, avant sa réhabilitation en URSS ; elle a complété la collection d'œuvres d'Akhmatova et de Mandelstam, commencées chez un autre éditeur, a publié deux volumes d'inédits de Goumilev, un inédit de Tsvétaïeva ainsi que le premier grand recueil de ses lettres. Mais YMCA-Press s'est également intéressée à la poésie plus récente, en publiant des recueils de poésies de I. Lisnianskaïa, O. Sedakova et I. Koublanovski, interdits en URSS il y encore peu de temps. Une collection de "Poésie choisie", limitée jusqu'à présent au XXe siècle, a été créée principalement pour les étudiants en slavistique : une attention particulière est accordée au choix des poèmes, qui, autant que possible, doit se rapprocher de celui de l’auteur, ainsi qu’à la mise en page. L’une des tâches de notre maison d’édition est aussi de mettre en forme et publier les archives littéraires de l’émigration. Jusqu'à présent, un seul recueil a été publié, consacré à la brève mais tumultueuse période du "Berlin russe", mais deux autres vont paraître bientôt : La Confrérie Sainte-Sophie (Prague Berlin Paris), contenant les comptes-rendus des réunions au cours desquelles les coryphées de la pensée russe discutaient des questions brûlantes du moment, ainsi que la Correspondance des rédacteurs de la meilleure des revues de l’émigration, « Les Annales contemporaines » (Sovremennye zapiski). Les albums d'art et de documents photographiques représentent une autre de nos nouvelles collections. Quatre tomes volumineux de Quarante fois quarante (Sorok Sorokov) contiennent des photos et des descriptions de toutes les églises existant à Moscou avant 1917, (compilateur : P. Palamartchouk). Les biographies et les photos (dans la mesure du possible) de plus de deux cent cinquante hiérarques orthodoxes morts en martyrs y ont également été rassemblées. Un album de toutes les églises de Saint-Pétersbourg est en préparation. Comme on peut déjà le voir d’après la liste de ces albums, la ligne principale de la maison d'édition reste la culture spirituelle orthodoxe russe. Répondant aux besoins de l'Église dévastée en Russie, notre maison a publié toute une série de livres liturgiques : l’Euchologe (Trebnik), le Hieratikon (Sluzhebnik), le Livre de prières (Molitvoslov), les textes de la Divine Liturgie et des Vigiles, les offices de la Semaine Sainte, et un recueil volumineux de prières en langue russe. Au sein de la deuxième génération de l’émigration, les théologiens succèdent aux philosophes : Florovski, Afanassieff, Zernov, Schmemann, Meyendorff et d'autres. De leur riche héritage, publié pour l’essentiel par YMCA-Press, nous distinguerons deux ouvrages véritablement prophétiques : L'Église du Saint-Esprit du protopresbytre Nicolas Afanassieff, qui expose avec la plus grande clarté l'idée que, dans l’Église, le pouvoir se dissout ou du moins doit se dissoudre, changer ontologiquement, dans l'amour ; et L'Eucharistie du protopresbytre Alexandre Schmemann, qui rétablit le vrai visage, par- delà les strates historiques, du sacrement fondamental du christianisme. Nous accordons une grande attention aux travaux historiques et à ceux consacrés aux fondements de la spiritualité orthodoxe. Une série consacrée aux ascètes, justes et martyrs russes du XXe siècle est née. La tradition de la littérature religieuse pour enfants a été poursuivie : une nouvelle édition des Feuillets pour apprendre à lire aux enfants, avec des illustrations d'une étonnante fraîcheur spirituelle et artistique de Sœur Ioanna Reitlinger, a connu un succès exceptionnel en Russie soviétique. L'intérêt pour l'orthodoxie en Occident et l'existence de communautés orthodoxes francophones ont incité YMCA-Press à entreprendre la publication d'ouvrages orthodoxes en français, traductions comme originaux (collection L’Échelle de Jacob). Les grands penseurs du début et du milieu du XXe siècle ne sont plus. Ils n’ont eu ni disciples, ni successeurs. Il est donc temps de systématiser leur héritage : YMCA-Press a entrepris de publier simultanément la collection des œuvres de trois auteurs : N. Berdiaev, P. Florenski et G. Fedotov.
Progressivement, un certain nombre d'œuvres encore inédites du protopresbytre Serge Boulgakov seront publiées.
Comme le montre cette brève liste des principales initiatives de notre maison d'édition, il est difficile de reprocher à YMCA-Press son inactivité. La maison d'édition et sa librairie ne comptent que sept employés : une assistante de direction, une comptable, une responsable commerciale, une typographe et demi, une rédactrice-correctrice d'épreuves, et un vendeur et demi... Pendant de nombreuses années, près de 70 ans, YMCA-Press a été presque la seule gardienne de la culture russe. Maintenant, alors que l'émancipation de la Russie est en marche, elle deviendra l'un de ses foyers, au même titre que les maisons d'édition de Russie. Participant à l’action commune de ses grands-pères, pères et petits-enfants, que ce soit ici, à l'étranger ou là-bas, en Russie, la maison d’édition YMCA-Press, se retournant non sans légitime fierté sur son long parcours, est prête à continuer à servir la littérature russe comme la culture théologique et spirituelle orthodoxe russe.
N. Struve 1990
Traduction Alice Lamboley, étudiante en master de traduction à l’Inalco.
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